> Éditorial  Jean Garrigues
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Le thème des socialistes au Parlement s’est imposé non seulement pour commémorer le centenaire de la SFIO mais aussi pour souligner le rapport spécifique des socialistes à la délibération. S’il est une famille qui délibère, qui échange par excellence, c’est bien la famille socialiste. Dans ses sections bien sûr, dans ses congrès, dans la presse, mais aussi dans les chambres.

Souvenons-nous des grands orateurs socialistes de la Troisième République, dont Jean Jaurès est la figure de proue. On pourrait à l’envi multiplier les citations jaurésiennes que de nombreux historiens ont collectées. Rappelons aussi les grands parlementaires que furent Alexandre Millerand, Aristide Briand, René Viviani, plus tard Léon Blum, ou même Guy Mollet, dont les discours parlementaires valent d’être relus et réhabilités.

Dans notre Forum, André Chandernagor, Claude Estier, Pierre Mauroy et Robert Verdier nous racontent le choc de la Ve République, la confrontation avec le parlementarisme rationalisé, le régime semi-présidentiel, l’alternance et la cohabitation, tandis qu’Yvette Roudy souligne la place que devraient tenir les femmes dans ce processus historique de parlementarisation.

La question centrale qui se pose à nous est de comprendre comment un parti issu de la classe ouvrière, et qui se veut son porte-parole, peut se fondre dans le moule de la représentativité parlementaire. Gérard Grunberg souligne la difficulté des socialistes à penser la démocratie représentative. Gilles Le Béguec pose la question pour la chambre haute. Les contraintes de la discipline partisane, confrontées aux vertus de la délibération, sont évoquées par Nicolas Roussellier et par Noëlline Castagnez. Olivier Wieviorka analyse les contraintes d’un moment spécifique, en l’occurrence les années sombres de l’Occupation. À travers l’exemple des paysans, Édouard Lynch met en lumière les déterminismes sociologiques, tandis que Rémi Lefebvre insiste sur les particularités géographiques du parlementarisme socialiste. Confronté à ces contraintes et à ces déterminismes, l’élu socialiste s’adapte, se forme, se technocratise (Gilles Morin), nourrissant la vie parlementaire de ses spécificités de socialiste (Gilles Candar) et la vie partisane de ses spécificités de parlementaire (Carole Bachelot).

De Jaurès à Mitterrand, les socialistes ont profondément marqué l’histoire de la vie parlementaire, comme le souligne Serge Berstein. Ils ont la parole dans Parlement(s).